Existe-t-il une alimentation idéale ou optimale ?

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Dans nos articles précédents, nous avons abordé l’alimentation de nos ancêtres néandertaliens et le fait que la plupart des aliments que nous consommons aujourd’hui n’ont vu le jour que depuis 100 à 200 ans. Et le fait que quasiment tous nos aliments modernes, si riches en glucides et en mauvaises graisses (graisses trans et excès d’oméga 6), constituent la nourriture favorite des bactéries nocives et pro-inflammatoires, elles-mêmes cause première de nombreuses maladies graves. Aujourd’hui, je vous propose de résumer toutes ces informations et d’essayer de comprendre s’il existe une alimentation idéale ou optimale qui permettrait aux gens, non seulement de rester en bonne santé, mais aussi de vivre longtemps. Selon vous, une telle alimentation est-elle possible ? Et si oui, que devrait-elle être ?

La réponse à cette question nous dirige au cœur de la médecine car nous devons comprendre comment ce que nous ingérons affecte le fonctionnement de notre corps, comment nos cellules fonctionnent et quels dysfonctionnements peuvent expliquer les maladies. Vous devez aussi comprendre comment la vie a commencé sur Terre et quel est le but de la vie. Et comprendre la biologie et la biochimie des cellules vivantes. C’est plutôt compliqué et nous devons intégrer là un peu de philosophie.

Pourquoi devrions-nous parler de philosophie à des fins médicales ?

Premièrement : je suis une approche holistique. Pour répondre à la question de savoir comment nos cellules fonctionnent, nous devrions réfléchir au sens de la vie pour la nature, et la réponse est la reproduction. La nature veut que nous transmettions nos gènes aux générations futures. Pour la nature donc, l’important ce sont nos gènes, seulement nos gènes, et pas nous ! Notre corps (le soma) constitue «l’enveloppe» protectrice de nos gènes. Lorsque nos gènes sont transmis à la génération suivante, la nature ne se soucie plus de nous. Mais nous, oui ! Nous voulons que notre corps vive longtemps et soit en bonne santé, et je pense que cela entre en conflit avec ce que la nature a conçu.

Deuxièmement : regardez autour de vous… Nous ne sommes pas seuls, nous vivons avec d’autres animaux, plantes et micro-organismes, et quantités d’interactions importantes se déroulent entre nous. Nous en avons discuté dans notre article précédent sur les bactéries et leur rôle pour notre santé. N’oubliez pas que les plus petits organites qui produisent la majeure partie de l’énergie dans nos cellules (les mitochondries) sont une sorte de bactérie que nos cellules ancestrales «ont mangée» à des fins de coopération dans le but de survivre, il y a des milliards d’années : «Je vais te protéger et tu produiras de l’énergie pour moi…»

Troisièmement : la nature et nos corps sont les «machines» les plus intelligentes et les plus fascinantes jamais réalisées. Ils sont capables de comprendre que lorsque la nourriture est disponible, il est temps de se diviser et de se reproduire, et que lorsqu’ils sont en état de jeûne, il est temps de se réparer et de se renforcer afin d’être prêts au moment où ils seront capables de se reproduire. Les mots «division», «reproduction» et certains problèmes de santé comme le cancer vous semblent-ils familiers ?

Pour parler franchement, pas dans le contexte de l’alimentation, des aliments sains et de la longévité.

C’est pourtant bien le cas. Les problèmes de santé sont directement liés au mécanisme de la division et de la réparation cellulaires qui sont eux-mêmes directement liés à la nutrition. Au fil des ans, de nombreuses études ont confirmé que notre santé dépend surtout de ce que nous mangeons. Car nos repas et nos heures de repas contrôlent l’expression de nos gènes. En d’autres termes, selon ce que vous mangez, vos gènes ne donnent pas les mêmes ordres. Et je le démontrerai plus tard. Commençons par ce que nous mangeons et la quantité de nourriture dont nous avons vraiment besoin.

Notre alimentation est censée nous fournir toutes les substances nécessaires au fonctionnement de notre corps. Toutefois, vous ne devriez pas croire tout ce qu’on nous a enseigné à l’école : «Mangez de tout et en grande quantité et le corps ne prendra automatiquement que ce dont il a besoin». Notre corps est le résultat de millions d’années d’évolution pendant lesquelles de courtes périodes d’abondance ont alterné avec de fréquentes périodes de pénurie alimentaire et de jeûne, de sorte que le corps prend plus ou moins tout ce qu’on lui fournit. Cela signifie que lorsque nous mangeons, nous devons fournir à notre corps les substances nécessaires, mais n’oubliez pas : elles doivent être présentes en quantité adéquate, ni trop, ni trop peu.

Dans votre article précédent sur les bactéries, vous avez expliqué que les sucres sont très nocifs pour nous. Mais je suis confuse quant à cette notion de sucre. On entend beaucoup parler de sucres, de glucose, de fructose, de sucres ou glucides simples, de sucres ou glucides complexes, de fibres solubles, de fibres insolubles, de l’amidon, de l’amidon résistant, etc. Parmi toute cette liste, lesquels sont vraiment nocifs pour nous ?

Je suis d’accord avec vous, le terme «sucres» prête à confusion et ne devrait pas être utilisé ; et la nomenclature est trop complexe pour le non-spécialiste. Toutes ces substances que vous avez énumérées font partie de la très grande famille des glucides. Dans cette famille, pour le présenter de manière simple, vous avez le glucose, les substances qui forment du glucose, le fructose, les fibres solubles qui sont transformées en graisses et en glucose par les bactéries, et les fibres insolubles. Et je propose de m’arrêter là.

Je sais que le glucose est absolument nécessaire à la vie humaine… Le corps humain a-t-il besoin de recevoir du glucose de sa nourriture ?

J’apprécie votre question car vous allez immédiatement saisir le malentendu sous-jacent. Le glucose est absolument nécessaire à certaines cellules comme les globules rouges et les cellules du cerveau. Alors oui, le glucose est indispensable. Mais non, nous n’avons pas besoin d’en manger, car notre corps est capable de synthétiser tout le glucose nécessaire, même si nous n’en mangeons pas. Ce mécanisme, connu depuis plus de 100 ans, se nomme la néoglucogenèse, ce qui signifie une production de glucose à partir de substances non glucidiques comme le glycérol ou les triglycérides, de certains acides aminés comme l’alanine et la glutamine, du lactate, du pyruvate, etc.

Notre corps n’a pas besoin du glucose externe que nous consommons en énormes quantités en mangeant toutes sortes de céréales, de sucres, etc. De nombreuses études ont démontré que la consommation de glucose peut au contraire nuire à la santé. Et nous sommes ensuite surpris de développer un diabète de type 2 ou d’autres problèmes de santé graves… Nous devons donc nous méfier des glucides qui peuvent se transformer en glucose que nous mangeons depuis quelques siècles et qui sont absolument inutiles pour notre corps. Lorsque nous mangeons de la pizza, des pâtes, du pain, de la crème glacée, des sucreries et des gâteaux, nous obtenons simplement un plaisir social, mais nous nuisons à notre corps qui n’a pas besoin de ces substances. En d’autres termes, notre alimentation peut être parfaite avec des protéines dans des limites raisonnables, beaucoup de «bonnes» graisses et de glucides qui ne se transforment pas en glucose, ainsi que des minéraux et des vitamines.

Le fructose est toxique, alors essayez de l’éviter. Aucune cellule de notre corps n’est capable de l’utiliser. Il n’est métabolisé que dans le foie où il se transforme en graisse, transformant ainsi notre foie en «foie gras». Le fructose peut vous faire grossir environ 40 fois plus que le glucose. Le fructose présent dans les fruits contient la même molécule, mais il est consommé en quantités bien moindres et accompagné des fibres des fruits, ce qui fait toute la différence. Donc, mangez des fruits pour leurs vitamines, mais en petites quantités, et évitez le fructose artificiel.

Voulez-vous dire que cette petite quantité de glucose produite par notre corps suffit au fonctionnement normal de nos cellules ?

Absolument. De nombreuses études l’ont prouvé. Vous savez, il existe des «nutriments essentiels», et essentiel signifie que vous devez en consommer car votre corps est incapable de les fabriquer. Il existe des graisses essentielles, des acides aminés essentiels, mais pas de glucides essentiels, et il n’existe pas de maladie telle que la carence en glucose.

Vous avez mentionné qu’il existe différents types de glucides : ceux qui se transforment en glucose et ceux qui ne se transforment pas en glucose. Parlons donc de ces deux catégories de glucides. Quelles sont-elles ?

Je vais tracer un schéma afin que vous puissiez mieux vous le représenter (il s’agit d’une représentation très simplifiée d’un système beaucoup plus complexe) :

Le fructose contenu dans les fruits peut être consommé en petites quantités. Nous pouvons manger des fruits parce qu’ils contiennent aussi des fibres et des vitamines. Mais nous devrions absolument éviter tout type de fructose artificiel et concentré parce qu’il n’est pas nécessaire et n’est donc « absorbé » par aucune de nos cellules, de sorte que tout le fructose est conduit au foie, qui au fil du temps est endommagé par sa concentration. Le fructose peut abaisser le taux d’insuline dans le sang, mais plus tard, le foie développe une résistance à l’insuline.

Ainsi, comme vous le voyez, tous les glucides ne contribuent pas à des problèmes de santé comme l’obésité, par exemple, et les maladies qu’elle provoque. Par exemple, les plantes et les fibres sont aussi des glucides (de «bons» glucides), mais seule une fraction d’entre elles peut être digérée et transformée en glucose ou en graisses à chaîne courte. Je suis sûr que je pourrais vous faire grossir en vous donnant de mauvais glucides en grande quantité. Cela ne se produira pas à cause du nombre de calories, mais parce que ces substances perturberont certaines voies hormonales. Je suis convaincu que l’obésité et d’autres maladies graves sont un problème d’origine hormonale et métabolique plutôt que génétique ou calorique!

Les fibres (nos «bons» glucides) ralentissent positivement la digestion et l’absorption de nutriments tels que le glucose par exemple, ce qui est également important. Elles donnent du volume (effet gonflant) et vous procurent le sentiment d’être rassasiés. Enfin, vos «bonnes bactéries» intestinales transforment certaines d’entre elles en acides gras à chaîne courte, importants pour votre santé.

Malheureusement, les aliments modernes sont transformés et les fibres ont pour la plupart disparu de notre alimentation, ce qui permet aux glucides d’être entièrement absorbés par nos intestins, d’où l’augmentation de notre taux d’insuline. Et l’insuline est l’une des hormones les plus dangereuses, surtout en grande quantité.

Comme nous l’avons vu, il existe de bons et de mauvais glucides. Et les graisses ? Existe-t-il vraiment de «bonnes» graisses ?

Pendant 50 ans, les graisses ont été calomniées à tort par la communauté médicale. Contrairement à la croyance populaire, de nombreuses graisses sont vraiment essentielles pour notre santé.

Par exemple, le cholestérol (qui est un type de graisse) est vital. Sans cholestérol, pas de vie ! Vous savez, un grand débat se déroule pour réfuter les dangers du cholestérol. D’autres types de graisses revêtent également une importance primordiale. Les graisses nous aident à digérer les minéraux et les vitamines ; les graisses sont une source d’énergie majeure pour nos cellules, elles sont aussi des composants des membranes cellulaires et des gaines nerveuses ; elles sont importantes pour les processus inflammatoires et anti-inflammatoires ainsi que pour la coagulation du sang, etc. Donc, sans matières grasses, nous sommes morts, également. Comme pour les glucides, il existe de nombreux types de graisses.

Dans les grandes lignes, en voici les différents types (autres que le cholestérol) :

*Dans le groupe des acides gras saturés, il faut distinguer les graisses saturées à chaîne courte (qui entre autres nourrissent le côlon et sont anti-inflammatoires, par exemple, les acides acétique, propionique et butyrique qui sont également produits par nos propres bactéries), les graisses saturées à chaîne moyenne (par exemple, l’acide caprique que l’on trouve dans le fromage) et les graisses saturées à longue chaîne (l’acide palmitique que l’on trouve dans certains desserts). Les graisses saturées doivent être consommées en petite quantité. Vous devriez préférer les deux premiers de ce groupe et éviter les graisses saturées à longue chaîne.

Nous avons besoin de tous les acides gras à l’exception des acides gras trans (malheureusement abondants dans notre alimentation et dans tous les types d’aliments frits, ainsi que dans les margarines hydrogénées). Certains acides gras ne sont nécessaires qu’en quantité limitée. C’est comme pour l’eau : en petite quantité, c’est essentiel, en grande quantité, elle peut vous noyer.

Quels produits contiennent les acides gras nécessaires ?

Le poisson, les légumes verts, certaines huiles végétales (lin, colza) contiennent des oméga 3.

L’huile d’olive, les avocats et la plupart des noix contiennent des acides gras monoinsaturés. Le lait, les produits laitiers, c’est-à-dire le fromage et le beurre, la viande contiennent des acides gras saturés.

La viande et la majorité des huiles végétales contiennent également des oméga 6.

Quelques mots au sujet des protéines pour nos lecteurs ?

Les protéines sont absolument essentielles à la vie, mais en quantité modérée, disons environ 1 gramme par kilo de poids corporel par jour (nous parlons de la moyenne des gens, pas de sportifs professionnels ou de culturistes). Mes études médicales en biologie et en biochimie (et beaucoup de publications confirment ce fait) m’ont convaincu que manger trop de protéines peut être aussi nocif que de manger trop de sucre, peut-être même pire. Par exemple, les protéines activent des voies métaboliques qui inhibent les mécanismes de réparation à l’intérieur des cellules et peu de gens savent que les protéines stimulent aussi la production d’insuline.

Vous avez mentionné plus tôt que notre métabolisme avait été déterminé par des périodes d’abondance et de pénurie de nourriture. Nous parlons souvent de ce qu’il faut manger et de ce qu’il ne faut pas manger. Nous avons maintenant identifié ce dont nous avons besoin pour que notre corps fonctionne correctement. Mais quelle est l’importance de l’idée du jeûne dans notre alimentation ?

«Combien manger», «que manger» et «combien de fois manger» sont les points clés ! Un manuscrit égyptien ancien trouvé dans un tombeau porte l’inscription suivante : «Un quart de ce que vous mangez vous maintient en vie. Les trois quarts restants maintiennent votre médecin en vie».

Je suis convaincu que la «fréquence des repas» joue le rôle le plus important en termes d’évolution, car avant l’apparition des supermarchés, les périodes de pénurie alimentaire prévalaient sur l’abondance alimentaire. Ce qui signifie que tous les êtres vivants se sont développés en tenant compte de cette condition. Les périodes de célébrations et les périodes de jeûne alternaient. Mais il n’y avait pas de périodes où les calories étaient tout le temps restreintes. Donc, si nous voulons adopter cette théorie, nous devons expliquer d’un point de vue biologique comment les périodes de jeûne peuvent avoir un effet favorable sur notre santé, peu importe à quel point cela peut paraître paradoxal pour certaines personnes.

Jeûne ou restriction calorique ?

Je parle de jeûner. Même si le jeûne et la restriction calorique ont démontré qu’ils augmentent la durée de vie animale, biologiquement, ce sont deux choses tout à fait différentes. De nos jours, nous sommes tous largement suralimentés dans la civilisation occidentale, car nous mangeons en plus grandes quantités et plus souvent que notre corps n’en a besoin. La restriction calorique, c’est mieux que de manger comme des fous, et la restriction calorique (tout dépend à quel point) peut augmenter votre durée de vie, mais pour ce qui est de la perte de poids, sur le long terme, ça ne fonctionne pas et ce n’est certainement pas utile. Nous avons donc besoin de jeûner durant certaines périodes, comme cela se passait dans la nature.

Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe lorsque l’on jeûne ?

Bien des adaptations métaboliques sont déjà connues, mais nous commençons tout juste à comprendre la biochimie précise des processus sous-jacents au jeûne. Que se passe-t-il après notre dernier repas ?

Au bout de 3 heures, le glucose et les acides aminés qui proviennent des protéines digérées entrent dans le sang et élèvent votre insuline et d’autres hormones. Cette insuline, entre autres tâches, vous met en mode de stockage et entraîne le foie à produire tout d’abord du glycogène (réserve d’énergie sous forme de glucose en quantités limitées), puis des dépôts de graisses (réserve d’énergie en quantités illimitées). Il n’existe pas d’autre façon de stocker les glucides ou les protéines, alors le corps transforme l’excédent en graisse ! Tout se transforme en graisse ! Trop de sucre, ça se transforme en graisse ! Trop de protéines, ça se transforme en graisse ! Mais la graisse ne se transforme pas en graisse ! Car la graisse ne stimule pas l’insuline… C’est phénoménal ! Au bout de 12 heures sans manger, l’insuline baisse et vous devez transformer le glycogène de votre foie en glucose (ces réserves sont limitées à quelques heures), et vous allez commencer à transformer votre graisse en énergie.

Après 36 heures de jeûne, l’insuline a diminué beaucoup plus et vous tirez finalement presque toute votre énergie de votre masse grasse. Votre foie, à partir la graisse, produit des corps cétoniques qui constituent un carburant fantastique pour votre cerveau et d’autres organes. Certaines études disent que c’est même mieux que le glucose.

Simultanément, d’autres voies très importantes sont activées pendant que vous jeûnez. En termes simples, de la naissance à la mort, nous réparons et entretenons constamment notre corps afin que son fonctionnement soit optimal. Mais pour ce faire, nous devons constamment renouveler une certaine quantité des éléments qui nous constituent, dont les protéines normalement endommagées qui doivent être remplacées par de nouvelles, lorsque les anciennes ont fait leur temps.

Cependant, le problème est que pour remplacer les protéines défectueuses, il vous faut d’abord un «nettoyage complet» : ranger le fouillis d’éléments indésirables, écarter tout ce qui ne fonctionne pas ou s’en débarrasser. Ce mécanisme de remplacement et d’élimination des éléments de notre corps qui ont vieilli est au cœur du prix Nobel de médecine 2016 et se nomme le mécanisme d’autophagie (du grec qui se mange lui-même). L’idée principale de ce mécanisme est que lors d’un jeûne, le corps va commencer à ramasser des fragments de cellules et toutes les substances et éléments hors d’usage et qui ne fonctionnent pas afin de s’en faire de la nourriture. L’autophagie aide à effectuer un nettoyage approfondi de notre corps et à remplacer tous les éléments endommagés par de nouveaux qui fonctionnent.

Mais avec notre alimentation moderne, ce mécanisme d’autophagie ne fonctionne plus comme il devrait. Notre corps n’est pas seulement dépourvu de la capacité de «réparer correctement» nos cellules en effectuant régulièrement un nettoyage approfondi en leur sein. Ces protéines qui ne fonctionnent pas vont s’amasser sur d’autres protéines qui ne fonctionnent pas, couche après couche. Des études montrent, et c’est aussi mon opinion, que ce mécanisme se trouve à la base de nombreuses maladies telles que par exemple le cancer, ou la maladie d’Alzheimer, lorsque les cellules du cerveau accumulent des protéines anormales.

Si j’ai bien compris, les mécanismes cellulaires d’autophagie «s’enclenchent» lorsque le corps cesse de recevoir de la nourriture ?

Exactement ! Notre corps ne peut pas faire 2 choses en même temps: il doit choisir entre réparer les vieux éléments ou se reproduire. L’idée de prendre 3 repas, et parfois 6 repas par jour, y compris de stupides collations entre deux, s’avère indiscutablement préjudiciable, car cela donne des instructions fausses au corps. En recevant constamment de la nourriture, notre corps passe en mode «reproduction» et éteint la fonction «réparation et entretien des cellules».

Et encore une fois, revenons aux origines de la vie lorsque les cellules primaires restaient face au choix : si j’ai de la nourriture, je me multiplie, si je n’ai pas de nourriture, je passe en mode «veille et amélioration», dans lequel «j’examine» tout, je répare les cellules endommagées, je m’améliore pour être au meilleur de ma forme au moment où je recevrai de la nourriture et pourrai me multiplier. Rappelez-vous ce que je vous ai dit : La nature ne veut pas que nous vivions longtemps, mais suffisamment longtemps pour transmettre nos gènes. Alors en mode jeûne, la nature améliore le corps (le soma) afin de permettre un futur transfert des gènes meilleur et plus efficace. Nous pouvons donc en tirer une conclusion : le corps humain a besoin de ces deux mécanismes à maintes reprises : la reproduction et la restauration, la reproduction et la restauration, et ainsi de suite. Mais avec notre style de vie et notre alimentation ainsi que l’apport constant d’une nourriture riche essentiellement en «mauvais» glucides et «mauvaises» graisses, sans fibres et avec beaucoup de fructose, les modes restauration et réparation sont quasiment toujours éteints et ne fonctionnent pas, alors que le mode reproduction est réglé au maximum. Et comme le corps n’a pas l’occasion de restaurer les cellules à leur état normal et sain avant la reproduction, cela entraîne une augmentation de toutes sortes de maladies.

Tous les régimes dont nous entendons parler diminuent la quantité de nourriture consommée. Et l’idée principale de nombre d’entre eux consiste à réduire le nombre de calories. Est-ce que limiter le nombre de calories consommées est la même chose que jeûner et cela aide-t-il à enclencher le mécanisme de «réparation cellulaire» ?

Non, absolument pas !

Tout d’abord, je suis convaincu que la théorie des calories est fausse : elle ne prend en compte que la quantité de nourriture ingérée, pas la qualité. La quantité de calories donne seulement l’énergie potentielle de la nourriture et pas ce que le corps va réellement en tirer. La façon dont nous préparons la nourriture ainsi que les bactéries intestinales sont des facteurs importants qui transforment l’énergie que nous absorbons. Compter les calories néglige quantité de ces paramètres.

Deuxièmement, je pense que ce qui importe est la composition de la calorie. Des études ont clairement démontré que la composition des calories (sucre, protéine, graisse, alcool, etc.) est plus importante que la quantité dans le but de réduire les maladies et d’allonger la durée de vie.

Vous devez donc approfondir cela pour savoir ce qui se trouve à la base de ce choix cellulaire, la reproduction et la restauration. En fait, le corps possède des détecteurs ou capteurs ; ils mesurent l’énergie. Il s’agit principalement de molécules qui vérifient en continu s’il y a assez de nourriture (= énergie). Et ces molécules envoient des instructions pour entrer en mode autophagie (manque de nourriture) ou reproduction (suffisamment de nourriture). Ces indicateurs (on en connaît environ 5 aujourd’hui) vérifient constamment la présence de différentes substances. Et dès que vous comprenez cela, il devient clair que ce qui importe n’est pas le nombre de calories, mais plutôt les types de substances détectées et leur quantité.

Je vais vous donner un autre exemple. Si vous mangez la chair d’un avocat d’environ 150 g, qui contient 22 g de graisse, 3 g de protéines, pas de glucose et 12 g de fibres, vous obtiendrez environ 230 kcal. Il n’y aura presque pas d’effet sur l’insuline et aucun mauvais effet sur le métabolisme, pas de problème de gain de poids, etc. C’est un super aliment.

Si vous consommez les mêmes calories, mais sous forme de gâteau au chocolat, par exemple, 230 kcal, vous ne devez en manger que 60 g environ, dont zéro fibres, 12 g de graisse, 3,5 g de protéines, mais 25 g de glucose. Vous aurez le même nombre de calories, mais votre insuline et d’autres hormones vont monter au plafond et compromettre l’expression de milliers de gènes. En d’autres termes, les calories ont une importance, mais ce qui les compose est bien plus important, car les protéines et les sucres influencent directement le basculement du mécanisme de «restauration» à celui de «division cellulaire». Les graisses, qui contiennent d’énormes quantités de calories, n’influencent quasiment pas les détecteurs.

Pour résumer, une alimentation optimale qui aide le corps à se restaurer lui-même et à revenir à la normale, en santé, consiste à réduire au maximum l’ingestion de glucides qui se transforment en glucose («mauvais» glucides), à consommer suffisamment de graisses et principalement de «bonnes» graisses, et des protéines en quantité raisonnable, car l’excès de protéine et, principalement, de protéines animales nourrit les bactéries nuisibles et bloque l’autophagie. Mais parallèlement à cet aspect qualitatif de la nourriture, il est très important que la prise de nourriture alterne avec des périodes de jeûne.

C’est juste. Nous devons toutefois expliquer la différence entre manger moins et ne pas manger du tout, et la différence entre ne pas manger pendant 1 h et ne pas manger pendant 24 heures. Ce qui n’est pas pareil. Manger moins c’est déjà bien, mais ce qui est mieux c’est de manger moins de «mauvais» glucides et la meilleure chose est de jeûner de temps en temps.

Combien de temps cette période de jeûne devrait-elle durer ?

Au moins 12 heures. Idéalement, 24 heures. Cela signifie manger une fois par jour, au moins une fois par semaine, mais pourquoi pas chaque jour si vous vous sentez bien… Je voudrais souligner que nous parlons de personnes en bonne santé, pas de personnes souffrant de maladies graves. Il est important de comprendre ce qui cause la gastrite. Soit dit en passant, il n’existe pas de traitement qui consiste à manger plus souvent comme certains médecins le prescrivent de façon incompréhensible. Après 24 heures de jeûne, vous pourrez réduire votre taux d’insuline de 70 % et votre mécanisme d’autophagie sera activé !

Si nous ne mangeons qu’une fois par jour, cela devrait-il être le matin, l’après-midi ou le soir ?

Dans l’idéal, c’est mieux de manger le matin car notre corps secrètera 20 à 25 % de plus d’insuline le soir, pour le même repas. Mais du point de vue social, il nous est plus facile de manger le soir, car le matin nous sommes toujours pressés, et vers la fin de la journée nous souhaitons nous retrouver en famille et dîner ensemble. C’est pourquoi dans la vraie vie, c’est plus facile de dîner.

Si vous mangez une fois toutes les 24 heures, le corps entre en mode jeûne et chaque repas est une surprise. Et cela signifie qu’il a basculé en mode restauration et réparation la majeure partie du temps. Alors que lorsque vous mangez aux repas habituels avec moins de nourriture (calories), le corps s’adapte en baissant son métabolisme de base (ceci est absolument fondamental !).

En d’autres termes, lorsque vous mangiez 2500 calories, votre corps dépensait la même quantité d’énergie et votre poids restait stable. Puis vous décidez de perdre du poids et de réduire votre consommation de nourriture de 700 calories par jour, par exemple, en espérant que votre corps va dépenser ces mêmes 2500 kcal et qu’ainsi vous «brûlerez» votre graisse. Mais le problème est que votre corps adapte son métabolisme et vous brûlerez 700 calories de moins. Vous vous retrouvez donc dans la même proportion que lorsque vous mangiez vos 2500 kcal : vous «brûlez» la même quantité que ce que vous avez mangé. Alors pourquoi me limiter et souffrir ? pensez-vous. Et vous retournez à la situation initiale et mangez vos 2500 kcal par jour en espérant que votre corps recommencera aussi à dépenser 2500 calories par jour. Mais le problème est que le métabolisme de base de votre corps restera à 1800 calories (700 calories de moins). Et la mauvaise surprise (qui n’est plus une surprise) est que vous grossissez. Et en même temps, les cellules fonctionneront avec le mode réparation éteint. Pas bon du tout !

En d’autres termes, limiter le nombre de calories = baisser le métabolisme de base = adaptation du corps = ça ne fonctionne pas. Alors que, jeûner périodiquement ≠ adaptation du corps ≠ baisser le métabolisme de base = un mode qui fonctionne. Autrement dit, comme vous l’avez compris, baisser le nombre de calories consommées donne un effet à court terme, mais ensuite la situation se détériore considérablement.

Est-ce que le jeûne périodique est bon seulement pour les personnes qui veulent perdre du poids ou pour tout le monde, indépendamment du poids, puisqu’il permet entre autres de restaurer les cellules à leur état initial de bonne santé, et que perdre du poids est un effet secondaire plaisant ?

J’aimerais répéter que nous parlons ici de personnes qui ne souffrent pas de maladies graves. Les études confirment que les personnes minces ne perdront pas de poids suite à un jeûne périodique mais vont très probablement optimiser leur métabolisme et améliorer leur santé. Quantité d’études effectuées sur différents types d’animaux, des vers aux mouches, aux poissons et petits mammifères, chiens, primates et maintenant sur les humains montrent une amélioration radicale de la longévité et une bonne santé. Nous pouvons supposer que les gens vivront probablement plus longtemps et souffriront de moins de maladies. Mais l’effet le plus favorable du jeûne périodique concerne les gens en surpoids dont la plupart des maladies sont causées par ce surpoids.

Et que pensez-vous du jeûne pratiqué dans de nombreuses religions ?

Je pense que le fait que toutes les religions du monde aient des périodes de jeûne n’est pas une coïncidence. Avant l’apparition des religions, les gens avaient réalisé que le jeûne thérapeutique permettait de soigner des maladies et d’améliorer la santé, etc. Et plus tard, les religions ont intégré les périodes de jeûne dans leur système.

Que conseilleriez-vous à nos lecteurs qui suivent votre rubrique pour se maintenir en bonne forme ?

Demain matin, nous serons plus vieux d’un jour, et il n’existe aucune solution pour arrêter ce processus. Mais nous pouvons réduire les conséquences du vieillissement. Ma recommandation concerne avant tout la rééducation nutritionnelle. Tous les régimes ont de «bons» résultats à court terme, mais vous reprendrez du poids. Il s’agit là du problème fondamental. La quintessence de mon approche est de reprogrammer le métabolisme en modifiant combien, quoi, à quelle fréquence : ne mangez pas trop, ne mangez pas trop de «mauvais» glucides, de «mauvaises» graisses et de protéines, ne mangez pas trop souvent.

Une fois de plus, nous excluons les malades, les femmes enceintes et les enfants de ces recommandations. À tous les autres, je recommanderais d’avoir des périodes d’un repas par jour en quantité normale (au moins une fois par semaine jusqu’à chaque jour si vous vous sentez bien), de consommer le moins possible de glucose et de glucides qui se transforment en glucose (sans fibres), de manger une quantité modérée de protéines, beaucoup de «bonnes» graisses, et tout ceci devrait provenir d’aliments qui contiennent des vitamines essentielles, des oligoéléments et des minéraux. Pour donner un exemple concret de menu : mangez de la viande rouge une fois par semaine ou toutes les deux semaines, mangez du poisson, des fruits de mer et d’autres types de viandes plusieurs fois par semaine, mangez toute quantité de légumes de toutes les couleurs, car les couleurs correspondent aux différentes vitamines, mangez de petites quantités de fruits avec peu de glucose mais beaucoup d’antioxydants et de vitamines (par exemple des baies sauvages, des framboises, des cassis, des airelles rouges, etc.) pour le plaisir. Le problème auquel nous sommes également confrontés maintenant est la qualité et la provenance des aliments. Essayez de manger local et bio ainsi que de saison.

Merci beaucoup pour cet interview. Et je suggère que nous parlions des maladies, des processus inflammatoires et de leur traitement par le jeûne dans notre prochaine publication.

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